Un adolescent sur deux a la télé dans sa chambre, sept sur dix se connectent quotidiennement à Internet. Comme beaucoup de parents, vous vous alarmez peut-être du temps passé par vos ados devant les écrans. Comment aborder ce sujet avec eux ? Comment, concrètement, fixer des limites ? Et quels mots trouver pour parler des dangers potentiels d’internet ?
Ces questions, et bien d’autres, nous les avons posées à Catherine Pinet-Fernandes, docteur en sociologie, et auteur du livre « Les ados et les médias » publié en 2008 chez Studyparents.
Un adolescent sur deux a la télé dans sa chambre, sept sur dix se connectent quotidiennement à Internet.
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Comme beaucoup de parents, vous vous alarmez peut-être du temps passé par vos ados devant les écrans.
Comment aborder ce sujet avec eux ? Comment, concrètement, fixer des limites ? Et quels mots trouver pour parler des dangers potentiels d’internet ?
Ces questions, et bien d’autres, nous les avons posées à Catherine Pinet-Fernandes, docteur en sociologie, et auteur du livre « Les ados et les médias » publié en 2008 chez Studyparents.
Avant tout, dé-dra-ma-ti-sez !
Bien entendu, les usages quasi-obsessionnels d’Internet ou de jeux vidéo doivent être traités avec la plus grande attention : si votre ado consacre tout son temps libre aux écrans, s’il ne fait plus de sport, n’a plus d’autres loisirs, si son temps passé avec les autres se réduit, si son sommeil ou ses résultats scolaires en souffrent, il est normal de s’inquiéter.
Mais dans les autres cas, il convient de prendre du recul, et même, pourquoi pas, de considérer les aspects positifs des loisirs sur écran.
Selon Catherine Pinet-Fernandes, « ce n’est pas parce que, nous, en tant que parents, n’utilisions pas internet ou les jeux vidéo à leur âge, que cette pratique est condamnable. C’est souvent parce que l’adulte ne comprend pas l’usage qui est fait de ces médias qu’il craint leurs effets néfastes éventuels. Essayer de comprendre les pratiques de l’adolescent sans les juger peut faciliter la communication parents/adolescents et rassurer les parents. »
Certes, cette communication peut sembler n’être pas toujours désirée par l’adolescent lui-même, surtout si les tentatives des parents sont maladroites et subites. C’est pourquoi il est plus facile de communiquer à propos des médias avec les adolescents si on commence tôt, dans l’enfance, dès les premiers usages de l’ordinateur, de l’internet. Catherine Pinet-Fernandes ajoute que « même si certains adolescents ne donnent pas suite aux tentatives de communication des parents autour de leurs pratiques, ils sont souvent rassurés par l’intérêt que leurs parents leur portent. »
Les nouveaux médias, un moyen pour l’ado de se construire en tant qu’adulte
Internet, tchat, blogs, jeu en réseaux, sont souvent décriés pour la superficialité des échanges qu’ils génèrent, voire pour la pauvreté et la répétitivité de leur contenu. Pourtant la photo n’est pas si noire qu’il n’y paraît : ils restent malgré tout, pour nos ados, des expérimentations de communication avec un cercle élargi de personnes, et des occasions de construire ou renforcer leur réseau de pairs, et partant de là leur identité.
Selon Catherine Pinet-Fernandes, « un adolescent qui utilise beaucoup média et écrans est un adolescent bien en lien avec les pratiques de sa génération. La pratique des médias est un moyen de mettre les parents à distance par le biais du langage SMS, par exemple, ou par le biais de la culture jeux vidéo que les parents ne comprennent pas toujours. Et, effectivement, mettre les parents relativement à distance est une des nécessités du futur adulte »
Comment limiter le temps devant les écrans ?
Des partisans du sablier au laisser-faire total, toutes les écoles existent au sein des parents … Et comme en toute chose, il s’agit peut-être de trouver le juste milieu.
Pour Catherine Pinet-Fernandes, « minuter le temps passé n’est pas nécessaire et peut sembler utopique quant à l’usage des écrans le mercredi et le soir, avant que les parents ne rentrent du travail. L’idéal serait de responsabiliser l’adolescent en fixant des règles que chacun fixe en fonction de sa conception de l’éducation. Ce peut être, par exemple, d’exiger que l’adolescent ait fait ses devoirs correctement dès qu’il rentre et, une fois que les devoirs sont faits, de considérer que l’adolescent peut passer autant de temps qu’il le désire devant l’ordinateur jusqu’à ce que les parents rentrent du travail.
Le plus important n’est pas de minuter le temps passé devant l’écran, c’est surtout d’appliquer certaines règles de base qui permettent d’éviter les débordements : pas d’ordinateur ou de télévision dans la chambre, pour éviter l’usage de ces appareils notamment la nuit ; et mettre l’ordinateur/télévision dans une pièce commune, pour pouvoir évaluer les pratiques et éventuellement jeter de temps en temps
un œil, surtout pour les plus jeunes, sur les sites visités. »
Les dangers d’internet : comment trouver les mots ?
D’après une lettre du CSA de 2004, 40% des adolescents ont entendu parler de pornographie entre 8 et 11 ans. 27% des garçons et 12% des filles ont vu leurs premières images pornographiques à cet âge-là.
Ces chiffres trop souvent oubliés ou occultés font dire à Catherine Pinet-Fernandes que l’éducation aux médias, même sur les sujets les plus sensibles (pornographie, pédophilie), doit se faire entre 7 et 11-12 ans : « Lorsqu’on initie un enfant à la recherche sur internet, par exemple, on peut lui expliquer qu’il peut tomber sur des images qu’il n’a pas cherchées avec, par exemple, des dames et des messieurs tout nus. Ca arrive. Il lui suffit alors de cliquer sur la croix rouge pour les faire disparaître. En ce qui concerne la pédophilie, sans expliquer ce dont il s’agit, on peut tout simplement lui conseiller de ne pas dialoguer avec des étrangers quels qu’ils soient car certains peuvent être mal intentionnés. Plus l’enfant grandit, plus on peut être précis dans les explications fournies. »
Mais l’éducation aux médias ne s’arrête pas là. Il s’agit aussi de donner aux enfants et aux adolescents un regard critique sur l’information qu’ils reçoivent, ainsi qu’à reconnaître les intentions commerciales ou publicitaires. Expliquer à un enfant de moins de 7 ans ce qu’est une publicité, par exemple, n’est pas inintéressant.
Enfin, il peut être judicieux de sensibiliser votre enfant ou ado, via son intérêt pour les blogs, à la notion de protection de l’image ou de la vie privée. L’ouvrage de Catherine Pinet-Fernandes recèle de nombreux exemples à ce propos. L’auteur précise : « Sans aller jusqu’à interdire, on peut tout à fait préciser la loi et ses conséquences à l’adolescent. On peut également lui fournir des conseils de manière à ce que son blog soit plus en accord avec cette loi : notamment en lui demandant de vérifier que les amis présents sur la photo sont d’accord avec le fait que cette photo soit mise en ligne sur le blog. Vous pouvez aussi régulièrement visiter son blog pour lui faire d’éventuels commentaires : élogieux ou relatifs aux interdits à respecter. L’adolescent doit également être conscient qu’il est responsable des messages laissés par les autres sur son blog. »
Et vous, quels mots trouvez-vous avec votre enfants ? Avez-vous voulu ou pu mettre en place des règles d’usage des écrans ? Venez en discuter sur le forum Cmonécole.
Et pour en savoir plus : Les ados et les médias , par Catherine Pinet-Fernandes, ed. Studyparents (2008)